Entre autres obligations, le Protocole relatif à la traite des personnes exige des États Parties qu’ils criminalisent la traite des personnes. Si la traite des personnes n’est pas reconnue comme un crime par le droit national, il est à craindre que la reconnaissance d’autres crimes au niveau national ne suffise pas pour traduire en justice les trafiquants. Par conséquent, l’exploitation et l’abus des victimes demeurent impunis. Tant que la traite des personnes n’est pas criminalisée ou qu’elle ne l’est pas conformément au Protocole relatif à la traite des personnes, plusieurs écueils demeurent : la traite d’êtres humains risque d’être considérée comme un crime moins grave, la coopération internationale au niveau des enquêtes peut être entravée, et les victimes se verront parfois refuser l’accès à la totalité des droits dont elles pourraient se prévaloir en tant que victimes de la traite d’êtres humains.

Comme précisé dans le Protocole relatif à la traite des personnes, la présence de trois éléments doit être avérée pour établir le crime de traite d’êtres humains : Il s’agit d’un acte d’un trafiquant d’êtres humains, employant des moyens particuliers à des fins d’exploitation. Toutefois, si la victime est un enfant, la traite des personnes est établie par le seul constat d’un « acte » et d’une « fin » d’exploitation, sachant que l’établissement des « moyens » n’est pas requis (article 3[c] du Protocole relatif à la traite des personnes). Plus de détails dans l’Introduction.

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Tableau 1. Les éléments du crime de traite des personnes

Il est important de comprendre l’indifférence du consentement : L’article 3(b) du Protocole relatif à la traite des personnes stipule que le consentement d’une victime à l’exploitation est indifférent lorsque le trafiquant a employé des « moyens ». Le consentement est toujours indifférent lorsque la victime est un enfant, étant donné que l’identification des « moyens » n’est pas requise dans ce cas. Les praticiens doivent comprendre que les victimes de la traite peuvent s'être volontairement soumises à des situations de traite et avoir consenti à des pratiques d’exploitation, mais qu’elles doivent néanmoins être considérées comme des victimes de la traite.

To Go Further
Policy Approaches
Criminalisation de la traite des personnes et des infractions pénales associées
  • Inscrire les éléments des crimes (acte, moyens, fins) dans la législation nationale, et prévoir également une sanction efficace (article 5 du Protocole relatif à la traite des personnes).
  • Établir le fait qu’il y a crime dès lors qu’un trafiquant emploie des « moyens », et ce, même si la victime a donné son consentement (article 3[b] du Protocole relatif à la traite des personnes).
  • Inscrire dans la législation le fait que, dans le cas d’enfants victimes de la traite, l’identification des « moyens » n’est pas requise pour que l’acte soit qualifié de crime de traite des personnes.
  • Criminaliser également les tentatives de traite des personnes, la participation à ce crime en tant que complice, ainsi que le fait d’organiser ou d’ordonner la traite par d’autres personnes.
  • Criminaliser d’autres crimes associés à la traite d’êtres humains, tels que la participation à un groupe de crime organisé, le blanchiment du produit du crime, la corruption et l’entrave au bon fonctionnement de la justice.
  • Établir une compétence extraterritoriale pour les cas de traite d’êtres humains et les infractions associées.
  • Faire appliquer les lois relatives à l’extradition et à l’entraide judiciaire. Cf l’outil de coopération de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), un répertoire en ligne des autorités nationales compétentes pour les demandes d’extradition et d’entraide judiciaire.

L’une des bonnes pratiques consiste également à s’assurer que les lois, politiques et pratiques protègent les victimes contre le risque d’être punie ou sanctionnée de quelque autre manière que ce soit pour les crimes qu’elles auraient commis en conséquence de leur soumission à la traite. Par exemple, dans les cas où les victimes de la traite d’êtres humains sont des migrants, il se peut qu’ils aient illégalement franchi des frontières, séjourné dans un pays au-delà de la durée de validité de leur visa ou violé de toute autre manière la loi alors qu’ils étaient victimes de la traite transnationale. Certaines personnes sont exploitées dans le cadre d’activités illégales dans certains pays, notamment pour cultiver de la drogue ou travailler dans l’industrie du sexe.

Policy Approaches
non-punition des victimes de la traite
  • Promouvoir une législation protégeant les victimes de la traite contre toute sanction pénale pour des infractions éventuellement commises en conséquence de leur soumission à la traite.
  • Encourager l’implication des victimes dans les enquêtes et les poursuites des trafiquants.
  • S’assurer que les victimes ne sont pas détenues dans des centres pour migrants ou au sein d’autres structures. Ce type de détention peut constituer une forme de revictimisation qui freinera leur reconstruction.
Messages clés
  • Le fait pour les États de définir le crime de traite des personnes conformément au droit international facilite la coopération internationale en matière de lutte contre la traite.
  • Le crime de traite implique trois éléments (l’acte, les moyens et la fin) sauf si la victime est un enfant, auquel cas seul un acte à des fins d’exploitation doit être établi.
  • Tant que la traite des personnes n’est pas criminalisée ou qu’elle ne l’est pas conformément au Protocole relatif à la traite des personnes, plusieurs écueils demeurent : la traite risque d’être considérée comme un crime moins grave, la coopération internationale au niveau des enquêtes peut être entravée, et les victimes se verront parfois refuser l’accès à la totalité des droits dont elles pourraient se prévaloir.
  • Le consentement d’une victime à l’exploitation est indifférent dès lors que le trafiquant a employé des « moyens ». Le consentement est toujours indifférent lorsque la victime est un enfant.
  • Les victimes de la traite ne doivent pas être punies ou pénalisées pour des crimes qu’elles auraient commis en conséquence directe de leur soumission à la traite, y compris les infractions liées à l’immigration.