De nombreux migrants sont jeunes, en bonne santé physiquement et mentalement lorsqu’ils entament leur voyage. Ce phénomène s’appelle « l'effet du migrant en bonne santé ». Néanmoins, les conditions difficiles vécues tout au long du cycle migratoire peuvent avoir des répercussions négatives sur leur santé. Les travailleurs migrants, et plus particulièrement ceux en situation irrégulière, ou ceux qui travaillent dans des secteurs informels ou encore sans contrat, peuvent être exposés à un voyage dangereux, à l’exploitation et à des conditions de vie et de travail insuffisantes, notamment une protection des travailleurs et une sécurité au travail faibles voire inexistantes. En l’occurrence, les risques liés à la sécurité sont courants dans les secteurs professionnels à haut-risque et dangereux comme celui du travail manuel. Souvent, les migrants peu qualifiés occupent des postes dans lesquels ils accomplissent des tâches salissantes, dangereuses et dégradantes, dans des pays où la protection des travailleurs et les mécanismes réglementaires sont faibles. Les secteurs de l'exploitation minière, de la construction et de l'agriculture, par exemple, enregistrent les taux les plus élevés d'accidents et de décès sur le lieu de travail et exposent les jeunes migrants à un risque accru d'accidents du travail et de blessures (Portail sur les données migratoires, 2021). Parallèlement, d’autres secteurs, tels que celui du travail domestique, exposent les jeunes femmes et adolescentes à des risques d’exploitation, de violence et d’abus car elles sont isolées et n’ont pas accès à des mécanismes de protection et d’aide (Rijks, 2014).
Le risque d’accidents du travail et d’accidents du travail mortels est ainsi accru (de plus amples détails sont disponibles au Santé et migration).
Les travailleurs migrants peuvent, de façon disproportionnée, avoir moins accès aux services de santé, notamment en raison :
- de barrières juridiques, administratives, linguistiques et culturelles, dues au manque de soutien de la part des employeurs ;
- de la discrimination dans les communautés d’accueil ;
- de la crainte d’être déporté.e ;
- d’un manque de connaissance de leurs droits en termes de contrat de travail et du statut migratoire ou du visa qui en découle.
L’exclusion sociale et l’éloignement de la famille et des systèmes d’assistance peuvent encore plus renforcer l’impact sur la santé et le bien-être des travailleurs migrants (voir les détails aux Intégration et cohésion sociale et Famille et migration). En plus des barrières juridiques, socioculturelles, comportementales, linguistiques et économiques et des conditions de vie et de travail difficiles (l’absence d’assurance maladie ou de congés maladie fournis par l’employeur), les travailleurs migrants connaissent très mal leurs droits et ont peu accès aux services sanitaires et sociaux, ce qui peut se répercuter sur leur santé. Dans cette situation, les travailleurs migrants ne chercheront peut-être pas à bénéficier des soins de santé ou d’autres services sociaux. Des conditions sanitaires critiques non traitées peuvent en découler, et peuvent également porter atteinte à la santé publique dans son ensemble, y compris en cas d’urgence sanitaire ou autre. Les travailleurs migrants en bonne santé sont plus à même de s’intégrer facilement, d’être plus productifs et d’obtenir des résultats positifs tant pour eux-mêmes que pour leurs pays d’origine et de destination.
La plupart des travailleurs migrants se soumettent à une évaluation sanitaire ou à un bilan de santé avant le départ et à l’arrivée, quand ces étapes sont requises dans le processus de recrutement. Dans de nombreux cas, en raison d’une mauvaise collecte de données, les bilans de santé ne s’accompagnent pas forcément d’une orientation vers les traitements et le suivi nécessaires, ce qui complique l’évaluation des conséquences pour la santé publique (Wickramage et Mosca, 2014). Les dépistages obligatoires pour des pathologies, comme le VIH ou des tests de grossesse, et le manque de pratiques de diagnostic et de gestion du suivi ont une valeur limitée en termes de santé publique et peuvent conduire à des pratiques d’exclusion inutiles. Pour que les évaluations sanitaires effectuées pour la migration et avant l’embauche contribuent significativement à une meilleure santé publique dans son ensemble, et favorisent également la santé des travailleurs migrants, il est essentiel de consolider les systèmes de santé nationaux.
Les gouvernements et les employeurs ont la responsabilité de veiller à la protection des droits des travailleurs migrants. La coopération multisectorielle entre, par exemple, les ministères de la santé et du travail est un point de départ pour veiller à la cohérence des politiques concernant la santé des travailleurs migrants. L’inclusion des travailleurs migrants dans les programmes de santé professionnels ou nationaux peut favoriser des résultats de santé positifs, pour les migrants, mais aussi pour les communautés d’accueil et peut déboucher sur une amélioration de la cohésion sociale dans son ensemble. Des mécanismes d’extension de la protection sociale pour la santé et d’amélioration de la couverture de sécurité sociale pour les migrants et leurs familles peuvent permettre l’accès aux services de santé et éviter les paiements directs quand les travailleurs migrants ont besoin de services de santé et les soins d’urgences inutilement coûteux. Par exemple, la transférabilité des assurances maladies via des accords bilatéraux de main-d'œuvre entre les pays d’origine et de destination peut donner aux migrants la possibilité de transférer, dans l’immédiat, les prestations sociales à leur famille dans leur pays d’origine ou de le faire plus tard, une fois qu’ils seront âgés, pour bénéficier de soins de santé, par exemple.