Un processus d'intégration fonctionnant correctement est essentiel au développement de relations harmonieuses dans une société comptant des migrants. L'OIM décrit ce processus comme une "adaptation mutuelle entre la société d'accueil et les migrants eux-mêmes, à la fois en tant qu'individus et en tant que groupes" (OIM, 2012). Il implique, d'une part, "un sens de l'obligation et le respect d'un ensemble de valeurs fondamentales qui lient les migrants et leur société d'accueil dans un but commun" (ibid). Il couvre, d'autre part, "les droits et les obligations des migrants et des sociétés d'accueil, y compris l'accès au marché du travail, à la santé et aux services sociaux, et à l'éducation pour les enfants et les adultes" (ibid). En bref, il s'agit d'une approche globale fondée sur le concept de l'universalité des droits de l'homme.
Ce contrat social est soumis à l'interaction normale des intérêts qui se manifestent inévitablement au cours des interactions humaines. Mais en temps de crise, la notion de confiance mutuelle sur laquelle repose une intégration réussie peut être ébranlée, tandis que des tensions indésirables s'accumulent et que des émotions surgissent. Cela peut être particulièrement le cas lors d'une pandémie telle que celle du COVID-19, lorsque la communauté mondiale a du mal à accepter ce qui se passe et est saisie d'un sentiment généralisé de malaise face à ce qui est encore à venir. Dans ces circonstances incertaines, il n'est que trop facile pour les groupes minoritaires - y compris les migrants - d'être marginalisés, d'être la cible de discriminations et d'éprouver, dans l'ensemble, un degré élevé de vulnérabilité.
Certaines raisons structurelles bien connues expliquent en grande partie cette vulnérabilité. Même dans les meilleures circonstances, les migrants peuvent être confrontés à la pauvreté, à de mauvaises conditions de logement, à des conditions d'emploi peu sûres, à des environnements de travail difficiles et à des taux de mortalité plus élevés que leurs homologues autochtones. En période de pandémie, ces désavantages sont amplifiés. En outre, les migrants ont tendance à être surreprésentés dans les secteurs du marché du travail les plus susceptibles d'être touchés par les confinements et les enfermements, tels que l'hôtellerie et les soins à domicile. Leurs enfants peuvent également être désavantagés par le manque de maîtrise de la langue nécessaire à l'apprentissage à distance ou par l'absence d'équipement approprié pour l'apprentissage à domicile (OCDE, 2020a).
Un autre problème qui peut se poser en période de pandémie est la désignation injustifiée des migrants comme étant à l'origine de la crise. Les origines précises de la pandémie de COVID-19 ne sont pas encore connues, mais le fait même que le virus traverse les frontières internationales avec une relative facilité a conduit à la stigmatisation des migrants en tant que transmetteurs de la maladie. La stigmatisation n'est pas seulement objectivement désagréable, elle est aussi déraisonnable et injuste. Elle ouvre la voie à la discrimination, aux abus et plus généralement à l'émergence de tensions interethniques. Du point de vue de la santé communautaire, elle peut également avoir des effets très négatifs sur le comportement des migrants, en les poussant à cacher leurs symptômes, en les décourageant de se faire soigner et en les dissuadant d'adopter des comportements sains. Cela est d'autant plus regrettable que les migrants ont largement contribué à la réponse communautaire à la pandémie, notamment en tant que prestataires de services dans le secteur de la santé (OCDE, 2020b).
Les migrants peuvent également avoir des difficultés à accéder aux services essentiels, en particulier aux services de santé et d'éducation. Cela peut être dû simplement à un manque d'information sur les aides disponibles, ou à un manque de familiarité avec les critères régissant les droits ou avec le mode de fonctionnement des agences gouvernementales.
Enfin, en cas d'urgence, les migrants peuvent ne pas avoir les capacités linguistiques ou ne pas être suffisamment connectés aux circuits de communication traditionnels pour se tenir au courant de l'évolution rapide de la situation. Ils peuvent ne pas être en mesure de comprendre, d'un point de vue linguistique, ce qu'ils peuvent ou ne peuvent pas faire à un moment donné.
Les réponses politiques à ces défis ne peuvent être formulées de manière isolée. Les questions d'intégration sont multiples. Il convient de se référer à des domaines politiques voisins, couvrant des questions telles que l'égalité des chances, la cohésion sociale, l'emploi, la santé publique ou l'éducation. Ce n'est qu'en faisant le lien entre ces domaines qu'un plan cohérent de gestion de l'intégration des migrants peut être élaboré pour faire face aux perturbations résultant d'une pandémie, que ce soit au niveau de l'individu, de la famille ou de la communauté.
Les gouvernements en sont conscients et ont réagi de multiples façons. Les points suivants décrivent les principales interventions, avec parfois des chevauchements entre elles.
- Élaborer et mettre en œuvre une stratégie de communication pour garantir la diffusion d'informations précises et actualisées sur tous les aspects de la pandémie, les mesures prises pour maintenir la sécurité et le bien-être de la communauté et rappeler la contribution positive des migrants à la vie sociale et économique, en particulier dans les secteurs de l'hôtellerie, des transports, de la santé et des soins à domicile ;
- Mettre en place des mesures appropriées pour prévenir ou contrer les expressions de xénophobie et de discrimination ;
- Veiller à ce que les migrants continuent d'avoir accès aux principaux services publics, en particulier aux services de santé ;
- Faire connaître et mettre à la disposition des migrants toute initiative spéciale du COVID-19 visant à apporter une aide financière ou une aide à l'emploi ad hoc aux familles ou aux personnes concernées ;
- Veiller à ce que les jeunes et les enfants migrants bénéficient d'une continuité de l'éducation, en mettant l'accent sur les ressources et les adaptations nécessaires pour permettre aux jeunes et aux enfants migrants de profiter pleinement des dispositifs d'enseignement à distance ;
- Donner aux migrants la possibilité d'interagir et de s'engager avec la communauté d'accueil et, en particulier, les faire participer aux processus de consultation et de planification.
Quelques exemples d'initiatives spécifiques qui ont été tentées sont présentés ici.