Après la Seconde Guerre mondiale, suite à l’adoption de la Charte des Nations Unies de 1945 et de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, différentes régions ont développé leurs propres systèmes d’instruments et de mécanismes juridiques régionaux, lesquels reflètent les normes internationales en matière de droits de l’homme, tout en incluant des perspectives régionales.
Après la Seconde Guerre mondiale, suite à l’adoption de la Charte des Nations Unies de 1945 et de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, différentes régions ont développé leurs propres systèmes d’instruments et de mécanismes juridiques régionaux, lesquels reflètent les normes internationales en matière de droits de l’homme, tout en incluant des perspectives régionales.
Instruments régionaux |
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Mécanismes de protection des droits de l’homme |
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Remarque : cette liste n’est pas exhaustive.
La Commission africaine des droits de l’homme a été créée en tant qu’organe de surveillance chargé de promouvoir et de protéger les droits de l’homme. Ses conclusions ne sont pas contraignantes en tant que telles, mais les États doivent les respecter compte tenu de l’obligation qui leur est faite, en vertu de l’article 1, de donner effet à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. La Commission a notamment constaté que les expulsions massives d’étrangers et les mesures d’éloignement illégales violaient l’article 18. La Charte a été respectée dans certains cas au moins (Viljoen et Louw, 2007).
La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples est compétente pour traiter les différends et donner des avis sur les instruments africains relatifs aux droits de l’homme que les États ont ratifiés. La Cour peut être saisie par :
- La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples ;
- Les États parties au Protocole ;
- Les organisations intergouvernementales africaines ;
- Les ONG bénéficiant du statut d’observateurs auprès de la Commission africaine et
- Les particuliers (uniquement à l’encontre des États qui ont reconnu la compétence de la Cour).
Dans une requête déposée par un particulier, le requérant affirme avoir été arbitrairement privé de sa nationalité tanzanienne par les autorités tanzaniennes et arbitrairement expulsé vers le Kenya où il a été considéré comme un migrant irrégulier et contraint de vivre dans la zone de transit entre les deux pays dans des conditions qu’il alléguait inhumaines et dégradantes. La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples a fait droit aux demandes et a conclu que :
- La charge de la preuve pour démontrer qu’un individu n’est pas un citoyen incombe à l’État ;
- La situation du requérant, privé de nationalité à la fois par la République-Unie de Tanzanie et par le Kenya, fait de lui un apatride au sens de la Convention relative au statut des apatrides.
- Même si le requérant avait été un migrant, son expulsion par la République-Unie de Tanzanie a été effectuée en violation de la loi puisqu’il n’a pas bénéficié du droit à une procédure régulière.
Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, Anudo Ochieng Anudo c. République-Unie de Tanzanie, 2018.
Il existe également des instruments et des mécanismes axés sur la liberté de circulation. Par exemple, au niveau régional, le Protocole de l’Union africaine au Traité d’Abuja relatif à la libre circulation des personnes (2018) régit la libre circulation des personnes, le droit de résidence et le droit d’établissement. D’autres instruments et mécanismes opèrent au niveau sous-régional.
Instruments sous-régionaux | |
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Mécanismes de responsabilité des instruments sous-régionaux |
Remarque : cette liste n’est pas exhaustive.
Instruments régionaux | |
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Mécanismes de protection des droits de l’homme |
Remarque : cette liste n’est pas exhaustive.
La Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) et la Cour interaméricaine des droits de l’homme (CIADH) sont toutes deux habilitées à examiner les plaintes.
La CIDH est un organe quasi-judiciaire et réalise ses tâches en s’appuyant sur trois axes de travail :
- Le système de pétition individuelle ;
- Le suivi de la situation des droits de la personne dans les États membres ;
- L’attention portée aux lignes thématiques prioritaires.
La CIDH a également établi un Rapporteur sur les droits des migrants. Ce rapporteur a pour mandat de garantir les droits des migrants et de leurs familles, des demandeurs d’asile, des réfugiés, des apatrides, des victimes de la traite d'êtres humains, des personnes déplacées en interne et d’autres groupes de personnes vulnérables dans le contexte de la mobilité humaine. Les conclusions et recommandations de la CIDH ne sont pas contraignantes pour les États membres.
Le mandat de la CIADH comprend l’examen et la décision sur les affaires qui lui sont soumises contre les États membres qui ont expressément accepté la compétence de la Cour. Ces affaires doivent d’abord être traitées par la Commission. Seuls les États parties et la Commission peuvent saisir la Cour. La Commission peut également s’adresser à la Cour pour obtenir des avis consultatifs. Les particuliers, en revanche, n’ont pas qualité pour agir. Surtout, les arrêts de la Cour sont contraignants pour les États parties.
Quelques-uns des avis consultatifs de la Cour interaméricaine des droits de l’homme relatifs au droit international de la migration sont présentés ci-dessous :
- L’institution de l’asile et sa reconnaissance comme droit de l’homme dans le système interaméricain de protection, 2018.
- Droits et garanties des enfants dans le contexte de la migration et/ou ayant besoin d’une protection internationale, 2014.
- Situation juridique et droits des migrants sans-papiers, 2003.
En vertu du Citizenship Statute, les citoyens du MERCOSUR ont le droit de circuler librement, de résider et de travailler dans les États membres du MERCOSUR et dans les cinq pays associés. Le droit du travail et les systèmes de protection sociale des États membres sont également harmonisés.
CONSEIL DE L’EUROPE |
UNION EUROPÉENNE |
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Instruments régionaux |
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Mécanisme de protection des droits de l’homme |
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Note : Cette liste n'est pas exhaustive.
En Europe, deux systèmes sont pertinents pour le droit international de la migration : le Conseil de l’Europe et l’Union européenne.
Le Conseil de l’Europe (CdE) est composé de 47 États parties à la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH). La CEDH garantit les droits civils et politiques et s’applique à toute personne relevant de la juridiction des États membres. Elle a été incorporée dans le système juridique de nombreux États parties et est par conséquent contraignante pour les États membres par le biais du droit national.
L’application de la CEDH est supervisée par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH).
En près de 50 ans d’existence, la Cour européenne des droits de l’homme s’est prononcée sur de nombreux cas de migrants invoquant des violations de leurs droits en vertu de la Convention européenne des droits de l’homme. Un nombre considérable d’arrêts ont permis de déterminer si le retour d’un migrant constituait une violation de droits spécifiques protégés par la Convention européenne des droits de l’homme. Il s’agit notamment des droits suivants :
- Le droit à la vie ;
- Le droit à un procès équitable ;
- Le droit au respect de la vie privée et familiale ;
- L’interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;
- L’interdiction de l’esclavage et du travail forcé ;
- L’interdiction des expulsions collectives.
La CEDH a également examiné des allégations de détention arbitraire et illégale formulées par des migrants.
La Charte sociale européenne (CSE) (révisée) est un autre traité du Conseil de l’Europe qui garantit les droits sociaux et économiques de chacun sans discrimination fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale ou l’origine sociale. La CSE est contrôlée par le Comité européen des Droits sociaux, qui gère le système par lequel les États rendent compte de leur engagement à l’égard de la CSE. Le Comité évalue les rapports et publie des conclusions, qui sont ensuite reflétées dans les résolutions respectives du Comité des ministres du Conseil de l’Europe. Il est également habilité à entendre les plaintes collectives, et non individuelles, contre les États qui ont accepté cette procédure. Le Comité rend des décisions concernant ces plaintes collectives.
Le Comité européen des Droits sociaux s’est penché sur la question de savoir si les migrants en situation irrégulière sont exclus ou non des droits de la Charte. Il a conclu que certains de ces droits sont « d’une importance fondamentale pour l’individu puisqu’ils sont liés au droit à la vie lui-même » et qu’à ce titre, ils s’appliquent également aux migrants en situation irrégulière.
Ils comprennent :
- Le droit à la protection de la santé (article 11 du Comité européen des Droits sociaux [CEDS]). Voir l’affaire Fédération Internationale des Ligues des Droits de l’Homme c. France (CEDS, 2004), paragr. 30 à 32 ;
- Le droit au logement (article 16) ;
- L’obligation de « fournir une protection et une aide spéciales de l’État aux enfants et adolescents privés temporairement ou définitivement du soutien de leur famille ». Voir l’affaire Défense des Enfants International (DEI) c. Belgique (CEDS, 2012), paragr. 136.
L’Union européenne est un accord économique et politique entre 28 États membres. Le traité de Lisbonne établit les règles relatives à la structure et au fonctionnement de l’Union européenne, tandis que la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne crée la citoyenneté de l’Union européenne et assure les droits politiques, sociaux et économiques des citoyens. La citoyenneté de l’Union européenne implique la liberté de circuler, de vivre et de travailler dans un autre État membre et de jouir des mêmes droits civils, socio-économiques et politiques que les ressortissants de ce pays.
L’une des principales réalisations de l’Union européenne est l’espace Schengen, qui abolit les frontières intérieures. Toutefois, en cas de menace grave pour l’ordre public ou la sécurité intérieure, un pays de l’espace Schengen peut exceptionnellement réintroduire le contrôle des frontières à ses frontières intérieures pour une période limitée, en principe, à 30 jours maximum. L’Accord de Schengen (CAAS) étend la liberté de circulation au-delà des États membres de l’Union européenne à quelques autres États également parties à l’accord. Il bénéficie aux ressortissants et aux résidents des États membres de l’espace Schengen, ainsi qu’aux non-ressortissants d’un certain nombre de pays définis. Un certain nombre d’autres instruments ont été ajoutés à la CAAS, afin d’assurer l’harmonisation des réglementations en matière de migration et d’asile entre les États membres.
Aujourd’hui, l’Union européenne a élaboré un large éventail de règles en matière de migration et d’asile, notamment :
· Le règlement relatif au code des visas
· La directive sur les résidents de longue durée
· La Directive « carte bleue »
· La directive relative au regroupement familial
· La Directive sur les conditions d’accueil
La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a deux fonctions principales. La première est d’interpréter la législation de l’Union européenne et de statuer sur les différends juridiques opposant les gouvernements nationaux et les institutions de l’Union européenne. La seconde consiste, dans certaines circonstances, à être saisie par des particuliers, des entreprises ou des organisations souhaitant intenter une action contre une institution de l’Union européenne lorsqu’ils estiment qu’elle a porté atteinte à leurs droits tels que reconnus par la législation de l’Union européenne.
Les particuliers peuvent déposer des plaintes auprès des tribunaux nationaux, qui peuvent ensuite soumettre l’affaire devant la CJUE pour qu’elle interprète la législation de l’Union européenne.
La CJUE a rendu un certain nombre d’arrêts importants dans le domaine de la migration, tels que des arrêts concernant le droit au respect de la vie familiale, le droit au retour et l’intérêt supérieur de l’enfant.
Dans l’affaire Abdida (CJUE, 2014), la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) s’est prononcée à la fois sur la directive Qualification de l’Union européenne et sur la directive Retour de l’Union européenne. M. Abdida, un ressortissant nigérian atteint du sida, a introduit une demande auprès de l’État belge en vue d’obtenir une autorisation de rester sur le territoire pour raisons médicales, mais cette autorisation lui a été refusée. L’affaire a été portée devant la CJUE dans le cadre d’un litige national.
Contrairement à l’Europe, à l’Afrique et aux Amériques, la région Asie-Pacifique ne dispose pas d’un système intergouvernemental à l’échelle régionale (tel que des traités, des tribunaux, des commissions ou d’autres institutions) ayant pour mandat de protéger et de promouvoir les droits de l’homme. Toutefois, des mesures ont été prises au niveau sous-régional pour renforcer les droits de l’homme, preuve qu’un système de droits de l’homme est en train d’émerger.
L’Association des Nations d’Asie du Sud-Est (ASEAN) a donné l’impulsion initiale aux efforts visant à promouvoir le respect, la protection et la réalisation des droits de l’homme parmi ses membres. La Déclaration des droits de l’homme de l’ASEAN, adoptée en 2012, a succédé à la création de la Commission intergouvernementale des droits de l’homme de l’ASEAN (AICHR) en 2009. Elle s’appuie également sur la Charte de l’ASEAN, qui préconise la création d’un organisme de défense des droits de l’homme (article 14). Les domaines prioritaires de l’AICHR en matière de droits de l’homme figurent dans le Programme de travail quinquennal. L’AICHR tient au moins deux réunions régulières par an et rend compte aux ministres des affaires étrangères de l’ASEAN.
Contrairement aux mécanismes d’autres régions, il n’existe pas de système judiciaire régional. Le rôle de l’AICHR est axé sur la sensibilisation et le renforcement des capacités, plutôt que sur le contrôle ou la garantie de la conformité.
En outre, les nations des îles du Pacifique sont en train de mettre en place des organismes de défense des droits de l’homme en fonction de leurs besoins et de leur situation spécifiques. Créé en 1996, le Forum Asie-Pacifique des institutions nationales des droits de l’homme (FAP), conjointement avec ses institutions membres et ses organisations partenaires, cherche à soutenir les différents systèmes de protection des droits de l’homme en place dans la région et à s’y engager.
Association des Nations d’Asie du Sud-Est (ASEAN), Déclaration des droits de l’homme, 2012.
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Commission intergouvernementale des droits de l’homme de l’ASEAN (AICHR), Mandat, 2009.
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AICHR, Programme de travail quinquennal : 2021–2025, 2020.
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Forum Asie-Pacifique des institutions nationales des droits de l’homme
Suite aux insurrections de 2010 dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MOAN), des initiatives ont été prises ces dernières années pour réformer le système de la Ligue des États arabes, y compris le système des droits de l’homme. Ces initiatives ont été menées par la Ligue et certains États parties à la Charte arabe des droits de l’homme, ainsi que par la société civile. Par exemple, en 2014, la Ligue a adopté le Statut de la Cour arabe des droits de l’homme (qui n’est pas encore en vigueur) afin de créer un organe judiciaire régional interétatique chargé de statuer sur les plaintes pour violation des droits de l’homme en vertu de la Charte. Un processus similaire a eu lieu pour aboutir à la version révisée de la Charte arabe des droits de l’homme en 2004.
Le Comité d’experts des droits de l’homme, composé de sept membres, reçoit des rapports périodiques des États parties afin de surveiller la mise en œuvre de la version révisée de 2004 de la Charte arabe des droits de l’homme. En revanche, il n’a pas pour mandat de recevoir les requêtes d’un État partie ou d’un particulier pour des violations de la Charte.
- Différentes régions ont développé des mécanismes de promotion et de protection des droits de l’homme. Certains d’entre eux sont plus développés et plus solides, grâce à des traités et des tribunaux (Afrique, Amériques et Europe), tandis que d’autres sont en cours de développement (Asie, Pacifique, Moyen-Orient et Afrique du Nord).
- Les systèmes régionaux cherchent, ou devraient chercher, à s’aligner sur les normes internationales en matière de droits de l’homme. Ils sont donc pertinents en matière de droit international de la migration, tout en offrant des perspectives sur le plan régional.