- Sinclair, G.F., To Reform the World: International Organizations and the Making of Modern States, 2019.
Les membres des organisations intergouvernementales (OIG) sont des États souverains. Les OIG sont généralement établies par des traités ou des chartes qui définissent le champ d’application et les paramètres de leurs fonctions. À toutes fins utiles, il existe une distinction entre une « organisation intergouvernementale » et une « organisation internationale » car cette dernière peut également comprendre des organisations non gouvernementales (ONG) parmi ses membres.
Le système des Nations Unies compte plusieurs organisations intergouvernementales, généralement appelées agences des Nations Unies. Plusieurs agences des Nations Unies déploient des activités en lien avec la migration, même si cette problématique ne fait pas partie des premières priorités de leurs interventions, car la migration a une incidence directe ou indirecte sur leur mandat principal. Ainsi, ONU Femmes déploie divers projets qui ciblent ou ont une incidence sur les migrants et leurs communautés. Il existe également des OIG en dehors du système des Nations Unies. Ici aussi, la migration ne fait pas nécessairement partie du mandat principal de ces OIG mais elles déploient des opérations qui y sont liées.
L'ensemble des lois et des principes internationaux qui, ensemble, définissent les droits et obligations des États dans le domaine de la migration, y compris les droits des migrants, est établi par des traités internationaux et d’autres instruments adoptés par les États dans le cadre des Assemblées Générales des Nations Unies. Les organes de l'Organisation des Nations Unies, tels que les organes de traités, soutiennent l’application de ces conventions (pour en savoir plus, veuillez consulter les Mécanismes de respect des dispositions au Chapitre 1.2.4 Droit international de la migration).
Dans le contexte plus large de l’Assemblée Générale des Nations Unies, il existe également des initiatives et résolutions directement ou indirectement liées à la migration. Ces initiatives et résolutions traitent de questions telles que la protection des migrants, la migration et le développement ainsi que la facilitation et la réduction des coûts de transfert des rapatriements de fonds des migrants.
L’OIM en tant qu’agence des migrations des Nations Unies
La principale organisation en charge des migrations aux Nations Unies est l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM). Fondée en 1951, l’OIM est devenue la principale organisation intergouvernementale dans le domaine des migrations. Elle travaille en étroite collaboration avec des partenaires gouvernementaux, intergouvernementaux et non-gouvernementaux, y compris avec les migrants eux-mêmes. En 2020, elle comptait 173 États membres, 9 États observateurs, 155 OIG et ONG ayant le statut d'observateur ainsi que plus de 430 bureaux dans plus de 100 pays. Jusqu’en 2016, l’OIM était une OIG indépendante. En septembre 2016, l’OIM est entrée dans le système des Nations Unies en tant que « organisation liée », appelée Agence des migrations des Nations Unies. Depuis ses débuts en tant qu’agence de logistique opérationnelle, l’OIM a élargi son champ d’intervention mais demeure attachée au principe selon lequel une migration humaine et ordonnée est dans l’intérêt de tous, des migrants et de la société.
Le travail de l’OIM est guidé par le Cadre de gouvernance des migrations (MiGOF) et la Vision stratégique de l’OIM 2019–2023 (OIM, 2019). Adopté par le Conseil de l’OIM en 2015, le Cadre de gouvernance des migrations énonce les éléments essentiels pour faciliter des migrations planifiées et bien gérées. L’OIM respecte et promeut les principes du MiGOF, et aide ainsi les gouvernements à se conformer aux normes internationales, à élaborer et mettre en œuvre des politiques fondées sur la connaissance des faits qui concernent différents secteurs politiques et à promouvoir des partenariats à l'échelle mondiale, régionale et nationale. Sa mission relative à la gestion des migrations couvre un éventail de domaines thématiques destinés à promouvoir le bien-être socioéconomique des migrants et de la société, des migrations sûres et ordonnées dans le respect de la dignité mais aussi, en cas de besoin, les dimensions de mobilité des crises.
OBJECTIF 1 : BIEN-ÊTRE SOCIOÉCONOMIQUE DES MIGRANTS ET DE LA SOCIÉTÉ | OBJECTIF 2 : DIMENSION DE LA MOBILITÉ DES CRISES | OBJECTIF 3 : MIGRATIONS SÛRES, ORDONNÉES ET DANS LA DIGNITÉ |
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Les évaluations sanitaires dans le contexte migratoire comptent parmi les services de gestion des migrations les mieux rodés de l'OIM. À la demande des gouvernements des pays d'accueil, l'OIM effectue une évaluation de l'état de santé physique et mentale des migrants pour faciliter leur réinstallation, leur recherche d'emploi à l’échelle internationale, l’obtention de visas temporaires ou permanents, ou leur participation à des programmes particuliers d’aide aux migrants (voir, par exemple, OIM, 2020). L’OIM réalise des évaluations sanitaires rapides et efficaces qui sont techniquement fiables, respectueuses de la législation nationale et internationale en matière de santé, et qui profitent et sont accessibles de manière équitable aux migrants. Étant donnée la diversité des politiques et pratiques en matière d’immigration à l’échelle nationale, les prescriptions et protocoles en matière d’évaluation sanitaire varient d’un pays d’accueil à l’autre. Ces prescriptions peuvent être particulières à certaines maladies posant des problèmes de santé publique, comme la tuberculose, ou avoir une portée bien plus large. Par ailleurs, les migrants sont au cœur du processus d’évaluation sanitaire, qui est adapté à leurs profils particuliers et à leur exposition individuelle aux risques. L’OIM s’efforce d’intégrer ses services d’évaluation sanitaire dans les programmes de contrôle et de prévention de maladies existant à l’échelle nationale, en collaborant avec des partenaires nationaux, en formant des fournisseurs de services locaux et en employant du personnel local. Cette démarche s’inscrit dans le cadre de la mission de sensibilisation de l’OIM, qui peut aider les gouvernements à se conformer aux normes régionales et internationales.
OIM, n.d.
- OIM, Constitution et textes fondamentaux (seconde édition), 2017.
- Assemblée générale des Nations Unies (AGNU), Accord sur les relations entre l’Organisation des Nations Unies et l’Organisation internationale pour les migrations (A/70/976), 2016b.
- OIM, MiGOF : Le Cadre de gouvernance des migrations (vidéo), 2016b.
- OIM, Vision stratégique de l’OIM 2019–2023 : Fixer un cap pour l’OIM. Cent dixième session du Conseil (C/110/INF/1), 2019.
En vertu du Pacte mondial pour la migration, l’OIM est investie de nouvelles responsabilités de coordination et de secrétariat du Réseau des Nations Unies sur la migration.
Réseau des Nations Unies sur la migration
Établi par le Secrétaire général en 2018, le Réseau des Nations Unies sur la migration entend apporter un soutien efficace, rapide et coordonné à l'échelle du système pour la mise en œuvre, le suivi et l’examen du Pacte mondial pour les migrations (PMM). L’OIM en assurera la coordination et le secrétariat (Pacte mondial pour les migrations, paragraphe 45).
Le Réseau des Nations Unies sur la migration réunit 39 entités du système des Nations Unies, dont neuf composent le Comité exécutif (Annexe I). Le Réseau noue des relations avec diverses parties prenantes, y compris conformément au principe directeur du Pacte sur l’approche mobilisant l’ensemble de la société (Pacte mondial pour la migration, paragraphe 15, j). Sa mission englobe celle poursuivie par les Réseaux nationaux et régionaux ou par des mécanismes similaires de coordination des migrations, ainsi que par les équipes de pays des Nations Unies.
Agences des Nations Unies |
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Remarque : Les organisations en gras font partie du Comité exécutif.
Le Réseau donne des impulsions pour que soit menée une action coordonnée et concertée dans le domaine de la migration, notamment en parlant d’une seule voix. Il fournit des idées, des outils, des données et des informations fiables, des analyses et des orientations stratégiques sur des questions de migration, et souligne ainsi les préoccupations et les pratiques positives. Comme préconisé par le Pacte mondial pour les migrations, le Réseau a institué le Fonds d’affectation spéciale pluripartenaires (M-MPTF) ainsi que le Pôle du Réseau sur les migrations (ensemble, le Pôle de liaison et la plateforme mondiale de connaissances) afin de renforcer la capacité des États à mettre en œuvre le Pacte. Ce dernier héberge des fonctionnalités, telles qu'une Communauté de pratiques, une base de données d’experts par thème, un espace de discussion en ligne et un large répertoire de ressources révisées par des pairs.
Par ailleurs, le Réseau appuie l’élaboration du rapport biennal du Secrétaire général des Nations Unies à l’Assemblée générale sur la mise en œuvre du Pacte mondial sur les migrations. Il apporte son appui aux mécanismes de suivi et d’examen dans le cadre des examens régionaux et mondiaux accomplis, successivement, tous les quatre ans (conformément aux paragraphes 48-54 du Pacte mondial pour les migrations). À cette fin, il participe à la préparation et à l’organisation du Forum d’examen des migrations internationales, notamment en recueillant les données communiquées volontairement à l'échelle locale, nationale, régionale et internationale sur les initiatives visant à mettre en œuvre le Pacte. Ces données seront mises à disposition sur le site Internet du Réseau sur la migration (pour en savoir plus sur le forum, voir Ensemble des initiatives et engagement pour répondre aux migrations au Chapitre 1.2.3 Initiatives et engagements pour répondre aux questions de migration).
- Réseau des Nations Unies sur les migrations, Mandat du Réseau des Nations Unies sur la migration, 2018 [en anglais].
- Réseau des Nations Unies sur la migration(Sites Internet), n.d.
Les organisations intergouvernementales ne faisant pas partie du système des Nations Unies sont des acteurs importants qui instaurent des forums utiles à l'élaboration des politiques et programmes migratoires dans certaines régions et sous-régions. En font notamment partie :
- Les OIG spécialisées ou thématiques, notamment dans l’humanitaire, le social, l’éducation, l’environnement, le développement ou l'économie/la finance. Les OIG telles que l’Organisation mondiale des douanes, l’Organisation internationale de police criminelle (INTERPOL), l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ou l’Union interparlementaire (UIP) peuvent gérer divers aspects de la migration parmi leurs États membres. Cette catégorie comprend également les banques multilatérales de développement telles que la Banque africaine de développement (BAD), la Banque interaméricaine de développement, la Black Sea Trade and Development Bank ou la Asian Development Bank.
- Les unions politiques et économiques (telles que les unions supranationales, les accords de libre-échange, les marchés communs, les unions douanières et les communautés économiques régionales) dès lors que la migration est une composante clé pour les États membres, tant au niveau de leur politique intérieure qu'extérieure. Les unions contribuent à l’élaboration de lois-types et de politiques qui orientent l’évolution de la politique nationale, qui établissent des politiques et lois régionales sur la migration et qui assurent la mise en œuvre et le contrôle, à l’échelle régionale, des initiatives internationales en matière de migration. Si la plupart de ces initiatives sont plus largement corrélées aux procédures de libre-échange et d’intégration régionale, presque toutes prévoient la libre circulation des personnes (migration) comme élément clé. Parmi ces unions figurent :
- L’Union africaine
- La Communauté économique de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN)
- La Communauté et le Marché commun des Caraïbes (CARICOM)
- Le Système d'intégration d'Amérique centrale (SICA)
- L’Union économique eurasiatique
- L’Union européenne
- Le Marché européen de l’Amérique du Sud (MERCOSUR)
De même, d’autres organisations sont à l’origine de forums importants sur l’élaboration des politiques et programmes migratoires dans certaines régions et sous-régions. La Communauté des États indépendants (CIS) et l’Organisation des États américains (OEA) en constituent deux exemples.
À mesure que le paysage de la migration évolue, de plus en plus d'acteurs réfléchissent à la question. Des partenariats innovants sont conclus avec les OIG, comme l’illustrent les accords avec les unions parlementaires et les banques multilatérales de développement.
En décembre 2018, l’Union interparlementaire (UIP) a collaboré avec le Parlement du Royaume du Maroc afin de coorganiser une Conférence parlementaire sur les migrations en prévision de l'adoption du Pacte mondial sur les migrations. À la suite de cette conférence, des parlementaires du monde entier se sont engagés à contribuer à la mise en œuvre du Pacte mondial pour les migrations et à œuvrer, au sein de leur parlement, à l'élaboration et à la mise en œuvre, d'un « plan d'action parlementaire pour les migrations » et à faire rapport à l'UIP en 2021.
De même, en 2009, le gouvernement français (ministère de l’Immigration, de l’Intégration et du Développement solidaire) s’est associé à la Banque africaine de développement (BAD) afin d’instituer un Développement multilatéral. Le fonds avait pour objet la réduction des coûts associés à l’envoi et à la réception des rapatriements de fonds. Il s’intéressait également aux possibilités de mobilisation de ces ressources dans l’intérêt des migrants et de leurs bénéficiaires ainsi que des communautés dans les pays d’accueil. Ainsi, le fonds a encouragé et soutenu des initiatives locales et des initiatives déployées par des migrants qui avaient vocation à réduire les coûts des transferts et à promouvoir une meilleure utilisation de ces capitaux.
UIP, 2018; AfDB, n.d.
La plupart des OIG extérieures au système des Nations Unies sont investies d’un mandat étendu : œuvrer à la coopération et à l’intégration économiques et politiques sur un territoire géographique défini. Par conséquent, la circulation des personnes sera toujours une composante indissociable de leur mission. Pour de nombreuses OIG, la migration n’est pas une priorité spécifique ou permanente, mais une question habituellement abordée dans le contexte de discussions plus larges, comme la facilitation des échanges commerciaux. Cependant, les initiatives déployées par les OIG en lien avec la migration conduisent souvent à l’adoption de principes et de directives politiques, qui peuvent constituer un fondement utile pour l’élaboration, par les États, de leurs politiques et lois nationales en matière de migration.
Les OIG extérieures au système des Nations Unies peuvent se révéler des partenaires indispensables aux agences en charge des questions de migration qui :
- Recherchent des conseils spécialisés sur certains aspects politiques en lien avec la migration ;
- Engagent les parties prenantes dans le cadre du dialogue politique sur la migration ;
- Atteignent des approches concertées sur les questions de migration aux niveaux régional et international ;
- Disposent de financements pour gérer les questions migratoires émergentes aux niveaux régional, interrégional ou mondial.
- Exploiter les études et données émanant des unions politiques et économiques ainsi que des organisations intergouvernementales spécialisées (OIG) afin d’élaborer des directives, politiques et cadres nationaux et régionaux.
- Contribuer à améliorer la compréhension des dynamiques régionales plus larges afin d’encourager les partenariats et la coopération par l’intégration de données propres à chaque pays dans les bases régionales.
- Renforcer l’harmonisation régionale par l’intégration, dans les politiques et lois nationales, des principes et directives politiques élaborés par les unions politiques et économiques ainsi que par les autres OIG extérieures au système des Nations Unies.
- Autant que nécessaire, inviter des conseillers et experts de la migration faisant partie d’OIG extérieures au système des Nations Unies à participer aux mécanismes d'élaboration de la politique nationale.
- OIM, Organisations intergouvernementales (page web), n.d.
- Union interparlementaire (UIP), Organisation internationale du Travail (OIT) et Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), Migration, droits de l’homme et gouvernance : Guide pratique à l’usage des parlementaires N° 24, 2015.
- Biermann, R., et J. A. Koops (eds.), Palgrave Handbook of Inter-Organizational Relations in World Politics, 2017.
- Börzel, T.A., et T. Risse (eds.), The Oxford Handbook of Comparative Regionalism, 2016.
- Si les États sont les principaux acteurs de la gouvernance et de la gestion des migrations, de nombreuses organisations intergouvernementales œuvrant sur les questions migratoires appuient ces mécanismes et y apportent de la valeur.