Dans cet exemple, le pouvoir central a décidé d'initier une politique de gestion de l'identité pour les non-ressortissants. La nécessité de cette réponse politique a été identifiée dans le cadre d'une stratégie nationale globale en matière de migration qui comprenait un axe de travail lié à la gestion efficace des frontières. Au stade de la formulation de la politique, l'enregistrement biométrique des ressortissants étrangers à l'entrée et à la sortie du territoire a été retenu comme l'option privilégiée, nécessitant de modifier les lois nationales sur la migration afin d'autoriser la demande de données biométriques. La politique a ensuite fait l'objet d'une évaluation du respect des normes relatives aux droits de l'homme afin de s'assurer que toute ingérence dans le droit au respect de la vie privée était nécessaire, légale et proportionnelle. Elle a également pris en compte les développements régionaux en matière de technologies biométriques afin d'optimiser la compatibilité avec les futures possibilités de partage des données. La politique a été adoptée, la loi a été votée et le financement a été trouvé pour que la nouvelle technologie soit d’abord déployée dans deux aéroports internationaux puis, progressivement, à plusieurs postes frontaliers terrestres. Le ministre compétent s'est engagé à mettre en œuvre le projet dans un délai de 12 mois et a insisté sur le fait que la mise en œuvre ne devait pas dépasser le budget alloué, basé sur des calculs de coûts effectués au cours de la phase de formulation de la politique.
Quelle approche du leadership et de la gouvernance pourrait soutenir la mise en œuvre ?
Un changement de politique mettant l'accent sur les nouvelles technologies requiert une équipe pluridisciplinaire dirigée par un professionnel efficace et autonome. Il s'agit de projets complexes à piloter compte tenu des besoins suivants :
- Approvisionnement (en solutions informatiques) et gestion des ressources ;
- Développement de la technologie, tests et formation ;
- Élaboration de procédures ; telles que les procédures opérationnelles standard qui définissent le processus opérationnel ainsi que des cadres de protection des données (pour en savoir plus sur le droit à la vie privée et la protection des données, voir Données, études et analyses pour l'élaboration d’une politique) ;
- des outils de communication, y compris des campagnes d'information pour les migrants.
La nomination d'un seul responsable de haut niveau doté des compétences, de l'expérience et de l'autorité nécessaires au sein de l'agence/du ministère chargé de la mise en œuvre et des agences/ministères connexes est essentielle pour la réussite d'un projet multidimensionnel et très coûteux.
L'équipe de mise en œuvre idéale pour ce projet vaste et technique pourrait rassembler spécialistes et généralistes. Le responsable principal, qui est sous l’autorité directe du ministre, peut avoir besoin d'une équipe composée de spécialistes informatiques internes pour collaborer avec les prestataires informatiques externes ; de fonctionnaires frontaliers expérimentés ayant une connaissance approfondie des opérations ; de responsables des achats et des contrats ; de spécialistes de la gestion des ressources ; d'experts en communication et en formation, et de juristes et de spécialistes de la protection de la vie privée. Dans l’idéal, il conviendrait d'assurer la diversité et la représentativité des sexes et des zones géographiques au sein de l'équipe de mise en œuvre, en particulier parmi les fonctionnaires frontaliers pour un maximum d’opinions et points de vue différents.
Au vu de la diversité des flux de travail, une structure de gouvernance adéquate pourrait inclure un comité directeur central diversifié et représentatif auquel seraient rattachées différentes équipes telles que : processus techniques et opérationnels, achats et ressources, procédures et formation, et communication. Et au vu de l'obligation de rendre compte au ministre compétent, il conviendrait de mettre en place des mécanismes permettant à chaque équipe de travail de communiquer régulièrement les progrès accomplis, risques identifiés pour la mise en œuvre et mesures d'atténuation des risques proposées inclus. Et dans le but de veiller à ce que le projet ne s'écarte pas des objectifs fixés, le responsable devrait suivre la progression de celui-ci au plus près. Il devrait aussi s’entourer de juristes et de spécialistes de la protection de la vie privée pour faire en sorte que la mise en œuvre respecte en tous points la législation nationale en vigueur et les normes internationales relatives à la protection des données.
Quels sont les outils nécessaires à la planification et à la gestion de projet ?
Ces projets multidimensionnels requièrent une expertise et une approche de la planification efficace. Un plan de mise en œuvre complet, avalisé via les modalités de gouvernance instituée, s’impose. Le respect des délais et du budget nécessite des contrôles rigoureux. Les échéances se doivent d’être réalistes et faire l’objet d’une concertation. Si l’achat de la technologie biométrique et/ou de capacités de développement est décidé, il faut tenir compte des délais standard et négocier les contrats pour s'aligner sur le plan de mise en œuvre.
Dans le cadre d’un projet de cette nature, les outils de gestion disponibles dans le commerce s’avèrent essentiels au vu de la nécessité de poser les jalons d'une série d'activités sur plusieurs sites. Un membre de l'équipe peut être en charge de la gestion de projet, mais l’équipe entière doit s’approprier les processus de gouvernance de celui-ci. Et au vu de la diversité des flux de travail et des équipes, les plateformes de collaboration sont essentielles pour assurer le partage des informations. Des outils de reporting tels que des tableaux de bord peuvent être utiles. Les réunions de planification et de suivi doivent également aborder la question des risques liés à la réalisation, notamment lorsque les délais, la qualité ou les ressources deviennent problématiques.
Pourquoi la communication est-elle importante tout au long de la mise en œuvre ?
Il convient de faire appel à des experts en communication pour s'assurer que tous les membres de l'équipe, les partenaires et les parties prenantes - y compris les bénéficiaires et le personnel impacté au quotidien par l'introduction de ces systèmes biométriques - comprennent tous la nature et l'objectif de la politique et puissent contribuer, le cas échéant, au processus de mise en œuvre. Le fait d’informer régulièrement les parties prenantes sur le processus de mise en œuvre et de les mobiliser permet d'améliorer leur état de préparation, de renforcer l'adhésion au projet et de créer les conditions propices au changement. Il est possible, par exemple, de fournir des mises à jours régulières aux fonctionnaires des frontières, aux autorités aéroportuaires, aux fonctionnaires des ministères concernés, aux autorités locales dans les zones frontalières, aux migrants susceptibles d'être impactés (peut-être via leurs représentants diplomatiques/consulaires) et aux groupes de la société civile concernés. La production d’une signalétique (comprenant des images utiles pour les personnes ayant un faible niveau d'alphabétisation, des messages audio et des traductions) et d'informations sur l'utilisation et la protection des données biométriques des migrants dans une langue qu'ils comprennent est également très utile.